plus c'est pareil.
J'avais toujours cru que le jour où je serais enceinte, je pourrais enfin respirer et dire adieu aux sentiments désagréables qui viennent avec l'infertilité. J'ai toujours pensé qu'une fois cette bataille gagnée, je ne ressentirais plus d'amertume, de jalousie, d'envie et de rage. Je me rends bien compte que je suis loin d'avoir fait la paix avec notre lutte. Même si je suis aujourd'hui enceinte et que j'en suis vraiment heureuse, je ne suis pas à l'abris de mes propres émotions contradictoires. Autour de moi, plein de femmes tombent enceinte une après l'autre. Même si, comme avant, je leur souhaite le plus beau des bonheurs, il y a comme une boule qui se forme en moi et qui grossit. Cette boule de rage, d'injustice et de jalousie me fait bouillir. Le simple fait de me sentir comme ça me fait encore plus bouillir, ce qui crée un cercle viscieux très déstabilisant. Je croyais que maintenant que j'avais ce que je leur enviais, je me ficherais bien de ce qui arrive aux autres, que je serais heureuse d'avoir enfin ce que je désirais tant et de ne plus subir la foutue injustice qui m'a fait si mal, si longtemps. Mais non! Je me retrouve au même point, avec les mêmes sentiments! Pourquoi suis-je jalouse de femmes qui ont la même chose que moi? Pourquoi suis-je enragée, alors que moi aussi j'ai la chance d'être enceinte? Parce que même si j'ai mon petit pépin qui pousse en moi, ça ne change en rien le chemin que nous avons dû parcourir pour y arriver. Et c'est ce chemin-là, c'est ce qu'il a laissé comme trace et comme cicatrices qui fait toute la différence. Oui, je suis enceinte, mais je n'y suis pas arrivée en un ou deux mois. Les femmes qui tombent enceintes autour de moi ces temps-ci ne font que me rappeler que ce que j'ai mis tant de temps et d'efforts à obtenir est encore facile pour la grande majorité des gens. Ce qui pour moi est si unique et tient presque du miracle, devient presque banal lorsque je regarde autour de moi. Je n'ai rien d'exceptionnel. Je n'ai rien d'unique et de spécial. Maintenant que je suis enceinte, je suis "comme les autres." Et ça, je n'en suis pas capable. Je ne tiens pas à être différente. Je ne tiens vraiment pas à avoir le spotlight. Mais j'aurais aimé pouvoir mieux reconnaître le côté spécial de cette grossesse parmi tant d'autres. Non, tout ce que ces grossesses faciles me rapellent, c'est que pour moi, ça a été difficile et que pour le reste du monde, ça été facile. Je n'ai pas plus de mérite que les autres. Je n'aurai pas plus de récompense en bout de ligne. J'aurai exactement la même chose que toutes celles qui n'ont mis aucun effort à tomber enceinte. Mes efforts m'ont menée ici, mais ce n'était que pour me rendre au même point que toutes les autres. Au point où j'en suis, les efforts et le temps passé à désirer, espérer, pleurer, me décourager, me resaisir, combattre la jalousie et la rage ne représentent plus rien. Ce que l'infertilité a fait ne pourra jamais être effacé, mais ça, personne ne le verra. Pour tout le reste du monde, je ne suis qu'une femme normale qui attend un enfant. Même si c'est une des choses les plus merveilleuses du monde, ça reste une chose banale pour trop de gens. On ne se pose même pas de question sur ce que ce bébé représente. C'est seulement normal qu'il soit là. Un couple s'aime. Ils vivent ensemble. Ils ont un enfant. C'est le cours normal des choses, c'est comme ça que la plupart des gens croit que ça fonctionne pour la terre entière. En fait, c'est comme ça que ça fonctionne réellement pour la majorité.
Oui, je suis amère. Oui, je suis jalouse. Je déteste me sentir comme ça, mais je ne peux rien y faire. Je sais trop bien, après 3 ans à essayer de les taire, que ces sentiments ont leur place et doivent être vécus. Je suis frustrée de voir que mon pépin ne sera qu'un parmis tant d'autres, que trop peu de gens sauront à quel point il a été désiré et attendu. Je ne veux pas de médaille. Je ne veux pas l'admiration des gens et encore moins leur pitié. Je voudrais seulement avoir le mérite qui nous revient. Je ne veux pas que tout ce que j'ai pris la peine de partager, tous les morceaux de mon coeur que j'ai étalés au grand public tombent dans l'oubli maintenant que j'ai une partie de notre rêve qui grandit en moi.
31 mai 2005
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