6 décembre 2008

Quatre ans

Étrange, ce que le temps peut faire. Il y a quatre ans, mon coeur éclatait. J'avais l'impression qu'une partie de moi se brisait à jamais. Alors que quelques heures aparavant, je vivais encore l'euphorie des jours qui suivent la bonne nouvelle, je me retrouvais au petit matin dans le sang et les larmes.

Il y a quatre ans, je perdais mon premier bébé.

Étrange, comme le temps peut changer les choses. J'y pense encore, à cette petite étoile filante. Rarement. En fait, seulement le 6 décembre, ou presque. Et plus de la même manière. Je n'ai plus de douleur, je n'ai plus de peine. Un petit frisson peut-être, un petit hochement de tête, et même, un petit sourire que seule mon étoile peut voir. Je ne me dis plus "si je ne l'avais pas perdu..." Je ne pense plus à quel âge il aurait, à ce que serait notre vie si... Parce que je l'aime, ma vie, telle qu'elle est maintenant. Parce que même si, avoir eu le choix, j'aurais préféré ne pas vivre de fausse-couche, je sais que si je ne l'avais pas vécu, je n'aurais pas Tithom et Tilou dans ma vie. Mon bonheur serait différent, mais le fait d'être heureuse aujourd'hui et d'aimer mes enfants avec chaque fibre de mon être m'empêche de regretter. Je ne vis plus dans le passé, même s'il m'arrive encore d'y penser de temps à autre. Mes pensées se dirigent aujourd'hui vers la femme que j'étais avant que ça arrive. Je pense au mal que j'ai eu, que nous avons eu. Je pense à la douleur, au vide, au sentiment de trahison et d'injustice. J'y pense sans amertume. J'y pense avec fierté, même. Car j'ai su passer au travers, à ma façon, à mon rhytme. Oh bien sûr, on était loin d'une tragédie. Il y a des choses pires que ça dans la vie, j'en conviens. Mais à ce moment-là, ce matin-là, il y a quatre ans, mon monde s'écroulait. Je ne voyais rien d'autre que le sang et la petite vie qui me quittait déjà. J'ai eu mal. J'ai saigné longtemps. Même après que mon corps ait fini de saigner, mon coeur, lui, a continué. Bien plus longtemps que je ne l'aurais imaginé. Je ne perdais pas seulement un bébé, mais l'idée d'un bébé, l'image que je me faisais de lui, de ce que nos vies deviendraient, de ce que je vivrais à travers la maternité. Je perdais un rêve.

Puis, est venu Tithom. Qui a tout changé. Qui a tout remis en perspective et qui a recollé les morceaux brisés avec un simple regard. Ma cicatrice est aujourd'hui si pâle qu'on ne la voit presque plus.

Le temps, étrangement, fait bien les choses, malgré tout.

5 commentaires:

  1. comme c'est si bien dit !
    avec le temps, les épreuves que nous avons traversées deviennent moins douloureuses et elles font en sorte que nous sommes ce que nous sommes aujourd'hui !

    moi aussi je suis fière de la femme que tu es devenue et de ta belle petite famille ;)

    xxxx

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  2. Je me retrouve tellement dans cet état présentement. J'ai mal et en même temps ça me fais du bien de te lire car je me sent moins seule.
    Merci de dire tout haut ce que je ressens tout bas.
    Milk@

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  3. Quel beau billet... Beau message d'espoir à toutes celles qui passent ou sont passées par là, et dont les cicatrices ne sont pas encore guéries...

    Et mille pensées à tous les anges du ciel...

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  4. Je suis venue relire ton billet ce matin avec des yeux différents... C'est la 1ere fois je me permets de commenter sur ce sujet, chaque fois que tu en parlais j'avais peur de jeter de l'huile sur le feu, parce qu'on était enceinte en même temps, parce que Babe s'est accroché lui, parce qu'on aurait peut-être accoucher le même jour.
    J'aurais espéré ne jamais comprendre ce sentiment...
    Je relirai ton billet encore quand j'en aurai besoin...

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  5. @Ysa: tu n'aurais jamais jeté de l'huile sur le feu. Même si, pendant les quelques mois qui ont suivi ma fausse-couche je voyais ta grossesse comme le symbole de ce qui aurait pu être, je ne l'ai plus pensé dès que je suis tombée enceinte de Tithom. Étrangement, justement, comment, sans remplacer le bébé qui ne naîtra jamais, l'enfant qui suit réussit sans le savoir à appaiser la douleur. Ça prend du temps, se remettre d'une fausse-couche. Mais ça finit bien par être moins vif, je te l'assure.

    @CaroD: merci pour les pensées.

    @M@rie-H: j'espère pour toi que le temps fera aussi bien les choses.

    @Marie: merci. Tu as entièrement raison.

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