27 novembre 2006

Un retour attendu

J'avais 11 ans quand j'ai eu mes règles pour la première fois. Je m'en souviens encore. Quand j'avais vu le sang, je m'étais demandé si je m'étais cognée en faisant du vélo. Mais j'ai vite compris ce qu'il m'arrivait... et j'ai pleuré. Ce que j'ignorais à ce moment-là c'est à quel point la signification de mes règles changerait au fil du temps.

À 11 ans, ça voulait dire que je devenais une femme. Ça voulait donc dire que je n'avais plus le droit de jouer à la poupée et de faire parler mes pouliches. Ça voulait aussi dire que j'allais devoir traîner des serviettes avec moi et endurer ce supplice féminin mois après mois. Je ne sais pas si ça a changé depuis, mais dans ce temps-là, il n'y avait pas de petite poubelle dans les cabines des toilettes pour jeter les serviettes. Je devais donc sortir avec mon petit paquet caché dans ma main et le jeter en espérant que personne ne me voit. À 11 ans, c'est humiliant.

Mais à 11 ans, quand je me suis rendue compte que mes règles ne revenaient pas à chaque mois, j'étais plus qu'heureuse. C'est plutôt vers 15 ans, alors que j'aurais aimé pouvoir planifier et ne plus me faire suprendre par des règles monstres qui arrivaient toujours au mauvais moment, que j'ai commencé à espérer être régulière. J'ai commencé à noter quand mes règles arrivaient et combien de temps elles duraient. Ça variait de un an à 2 semaines, pour des durées de 2 à 15 jours. C'était frustrant. Je devais toujours faire attention. Je devais toujours avoir le nécessaire sur moi, au cas où.

Vers 17 ans, j'en ai eu assez de tout ça. J'ai pris le taureau par les cornes et je suis allée consulter, seule, sans ma mère. Mes régles, quand elles se montraient, étaient une torture. J'avais mal, j'étais étourdie, je remplissais mon lit de sang la nuit. J'en avais vraiment assez de me sentir extra-terrestre. Le médecin m'a d'abord fait faire un bilan sanguin, qui a révélé un taux élevé de prolactine. J'ai donc par la suite passé une résonnance magnétique (rien à signaler), un autre bilan sanguin (mon taux était redevenu normal) et été suivie par un endocrinologue. Tout ça pour me faire dire que je n'avais pas de problème. Mon médecin de famille m'a prescrit la pilule et c'en était fini des cycles irréguliers ou inexistants.

Jusqu'à ce qu'on décide d'essayer de faire un bébé. Mes règles étaient alors synonymes d'échec, d'espoir gaspillé. S'en suivirent longs cycles anovulatoires, diagnostic d'ovaires polykystiques, traitements de fertilité, et après 3 ans, Tithom. Depuis l'accouchement, rien. J'ai eu un peu de spotting il y a un peu plus d'un mois, mais je ne considérais pas ça comme un retour de couches. J'allaite encore, donc je peux encore mettre le blâme là-dessus. Je peux encore me dire que mes règles peuvent revenir après et être régulières. Mais je n'y crois plus vraiment. Je ne croyais même pas qu'elles reviendraient d'elles-mêmes...

Il y a deux semaines, j'ai eu de fortes douleurs à l'ovaire droit, ou enfin, aux environs de l'ovaire droit. Et il y a quelques jours, du spotting. Je ne croyais pas un jour être aussi heureuse de tacher une culotte. Je me suis demandé si c'était une coïncidence, les douleurs 2 semaines avant les saignements. Je me suis énervée, me disant que j'avais des règles naturelles, chose qui ne m'était pas arrivée depuis... je ne sais même pas depuis quand! Puis le lendemain, plus rien. Et le sur-lendemain, ça a recommencé. Je me sentais comme une ado, à traîner ce qu'il fallait, juste au cas où. Ça crée des anecdotes cocasses dans un party quand un p'tit tannant fouille dans mon sac à mains et se promène partout dans la maison avec mon sac de tampons, je vous l'accorde. Mais ça me tanne de ne pas avoir un corps normal et prévisible. Ça me frustre de ne pas être comme les autres.

Je ne sais toujours pas si c'est mon retour de couches, mais pour la forme et parce que ça me fait du bien de croire que c'est ça, je vais considérer mes saignements comme tel. Je sais au fond de moi que je ne tomberai jamais enceinte au naturel. Je sais au fond de moi que ça ne me donne rien de croire aux miracles, que ça ne m'arrivera pas à moi. Mais une toute petite voix me dit que même s'il y a une chance microscopique, que c'est déjà ça et que je dois y croire pour l'instant. Dans quelques mois, quand j'aurai arrêté d'allaiter, quand mon corps sera revenu à son état "normal", quand je serai impatiente de revoir mes règles qui n'arriveront pas, là, j'arrêterai d'écouter la petite voix. Pour l'instant, j'aime vivre avec l'illusion qu'il y a une possibilité, si minuscule soit-elle.

4 commentaires:

  1. On sait jamais, il paraît qu'une grossesse peut changer les choses de ce côté là aussi... j'espère avec toi Kiwi !

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  2. Je souhaite tellement, mais tellement que ce soit tes règles qui soient de retour, ma belle Kiwi !!!

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  3. continue de croire ma belle, ce n'est pas interdit... et pas impossible non plus que ce soit ca !!
    je te souhaite que ce soit ce que ta petite voix te dit ;)
    xxx

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  4. Le positivisme peut faire des miracles :) Et à ta place, j'aurais aussi l'espérance que tu as. Ya rien d'impossible quand on y croît! Tiens-nous au courant de tes règles!!! ;)

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