18 février 2006

L'allaitement

J'ai eu ma montée de lait en revenant de l'hôpital. Bébé ne voulait plus prendre le sein, c'était bien trop gros et dur pour lui! Je le comprends, pauvre lui, j'avais des seins jusque dans le cou et sous les bras! Je réussissais à moitié à lui donner le sein couchée, mais il n'avalait pas grand chose. Nous avons passé la première nuit collés juste nous deux. Hom a dormi sur le divan, il avait trop peur d'écraser bébé dans son sommeil. Je le nourrissais de peine et de misère, mais mes seins étaient durs comme de la roche. J'avais beau extraire du lait avant, Tithom ne voulait pas garder le sein dans sa bouche, ça coulait trop vite pour lui. J'étais découragée, je trouvais ça très demandant en partant et là, ça ne fonctionnait même pas...

Le lendemain a été pareil. La seule chose que j'arrivais à faire, c'était de remplir sa bouche de lait pour qu'il l'avale... Je me sentais tellement incompétente, tellement nulle... pas capable de nourrir son enfant! Mes seins défiaient la gravité et auraient rendu jalouse n'importe quelle call-girl. C'était immense et dur sans bon sens! J'avais, pour la première fois de ma vie, une vraie craque! Mes seins se touchaient, c'est pas peu dire... Et ça commençait à faire vraiment mal...

Ma mère est venue nous rendre visite et une amie aussi. Bébé a dormi tout ce temps et nous avons regretté par la suite de ne pas avoir mis mon amie dehors plus tôt pour en profiter pour nous reposer. J'avais les émotions à fleur de peau, avec toute l'accumulation de fatigue, d'émotions fortes et d'hormones des derniers jours... Je pleurais à rien, à chaudes larmes. Tout me semblait gros et noir. Tithom n'avait presque rien bu de la journée. Ma marraine d'allaitement m'avait suggéré de mettre des feuilles de chou sur mes seins pour soulager la douleur et de les compresser pour les désengorger un peu. C'est ce que j'ai fait. Dans la nuit, Hom est allé à la pharmacie acheter des couches et il m'a acheté un tire-lait. Nous avons nourri bébé avec un compte-gouttes, ne sachant plus quoi faire.

Les feuilles de chou ont fait effet, je n'avais plus trop mal. Je sentais peut-être la soupe au chou et je n'étais peut-être pas du tout chic avec mes feuilles de chou dans mon soutien-gorge, mais au moins, je ne souffrais plus.

Le matin venu, j'ai rappelé ma marraine d'allaitement, en détresse. Bébé ne boit pas, il ne fait plus de selle, qu'est-ce que je fais? Je ne veux pas lui donner de biberon, mais je ne veux pas qu'il soit malade non-plus! Pourquoi est-ce que je suis si pourrie pour le nourrir? C'est supposé être naturel! Suis-je une si mauvaise mère? Ce n'était peut-être pas fait pour moi...

Hom est allé chercher une seringue de plastique à la pharmacie et nous l'avons nourri ainsi, avec le lait que je tirais. Nous sommes allés à la halte d'allaitement avec ma marraine, question de voir si c'était un problème de position ou de réflexe d'éjection ou seulement un caprice. L'infirmière de la halte m'a complètement dégoûtée. Elle était en train de manger sa salade quand elle m'a pris le sein et l'a placé de force dans la bouche de mon gars. Excuse-moi, ça ne te tenterait pas d'avaler ta bouchée avant de me tripotter? Je trippe juste pas de me faire mâcher dans les oreilles pendant que tu pinces mon mamelon pour nourrir mon fils. Vraiment, aucune classe...

Nous avons pu en conclure par contre que ce n'était pas un problème de position. C'était juste trop gros, trop dur et ça coulait trop vite. Nous devions nous armer de patience et ne pas nous battre avec bébé pour le nourrir de force. Il finirait bien par revenir au sein.

De retour chez nous, ça ne fonctionnait toujours pas. Je pleurais, je ne savais plus quoi faire, je ne comprenais rien. J'avais tout lu sur l'allaitement, j'avais les ressources, le support... Pourquoi est-ce que ça ne marchait pas? Étais-je folle d'y tenir autant? Pour moi, c'était hors de question de lui donner un biberon. L'allaitement était bien trop important pour moi et je suis très entêtée. Ça faisait près de 24h que bébé n'avait pas fait de selle, ça commençait à nous inquiéter. Il buvait pas mal à la seringue, mais ça ne remplaçait pas le sein maternel...

Puis, enfin, il a fait une selle. Je crois que nous ne serons jamais aussi heureux de changer une couche que nous l'étions à ce moment-là. S'il y avait quelque chose qui sortait, c'était qu'il y avait bien quelque chose qui entrait. C'était bon signe et ça nous enlevait un poids de sur les épaules, même si l'allaitement n'était pas réglé.

Le jour suivant, le jeudi, bébé buvait toujours à la serignue. Nous prenions tout en note: les heures, la quantité, les couches... Les choses semblaient se placer, mais Tithom se choquait encore quand je lui mettais le mamelon dans la bouche. On m'a parlé de muguet, on m'a donné des conseils, des nouvelles positions... Je ne voulais vraiment pas aller à la clinique d'urgence avec un bébé de 5 jours, entre les madames qui toussent et les vieux qui éternuent... J'ai donc parlé à l'infirmière du CLSC qui devait passer chez nous le lendemain. Elle m'a dit d'attendre, qu'elle verrait s'il y avait raison de consulter. Nous avons donc encore patienté. Et j'ai encore pleuré. Foutues hormones.

Le vendredi matin, l'infirmière est venue faire son tour, peser bébé, poser des questions... Je lui ai demandé si elle pouvait vérifier si c'était la position d'allaitement qui n'était pas correcte. Je me suis donc installée et après quelques secondes et une pincée de mamelon, bébé tétait, comme s'il n'avait jamais arrêté. Il tétait, enfin! Je le nourrissais directement, j'étais tellement fière et soulagée! Exit la seringue, mon bébé boit maintenant collé sur moi, les petits poings serrés et sa petite tête sur mon bras. Il est tout chaud, tout beau et s'abandonne enfin!

Depuis ce vendredi, Tithom a toujours bien pris le sein droit. Il avait par contre encore de la difficulté avec le sein gauche. Il ne le prenait que si j'étais couchée. Sans être dramatique, c'était quand même fatigant de ne pas pouvoir lui donner le sein seule. En position couchée, j'avais toujours besoin de Hom pour m'aider. Je n'arrivais pas à placer mon sein et à placer bébé en même temps... Hom devait donc pousser la tête de bébé pendant que moi, je lui plaçais le sein dans la bouche. J'essayais quand même régulièrement de lui donner en position assise, au cas où il le prendrait. C'est arrivé quelques fois, mais c'était rare.

Hier, c'était ma première journée seule avec Tithom. Hom devait aller aider au travail. J'avais peur de ne pas arriver à le nourrir comme il faut. Je ne savais pas ce que je ferais pour le faire boire du sein gauche. Mais je n'ai pas eu à me poser la question trop longtemps: il a pris le sein gauche sans se choquer ou se débattre. Il l'a pris et l'a repris depuis, sans problème. Une autre étape de franchie!

Cette semaine, j'ai aussi eu comme une deuxième montée laiteuse. Mes seins sont redevenus durs et gros, quoi que pas autant qu'à mon retour de l'hôpital. Je sens maintenant le lait arriver aux deux heures environ. Ça picotte et ça m'élance, m'annonçant que bébé se réveillera bientôt pour son boire. On m'a dit que ça annonçait une poussée de croissance. J'avais lu et entendu toutes sortes d'histoires sur les poussées de croissance, je craignais donc le pire. Dans la nuit de mercredi à jeudi, Tithom a bu sans arrêt de 1h am à 8h am. Nous étions épuisés. Il a ensuite fait plusieurs tétées groupées dans la journées, mais il dormait entre chacune, heureusement. Puis ça s'est replacé le lendemain. Si c'était vraiment une poussée de croissance, j'ai été chanceuse... cette fois!

Je n'avais pas vraiment d'attente face à l'allaitement... Je savais que ce n'était pas tous les jours faciles, mais que ça vallait vraiment la peine de persévérer. Les premiers jours, il y a plusieurs moments où je me disais "wow... maintenant je comprends les femmes qui décident d'arrêter... c'est vraiment difficile!" Mais je ne voulais pas lâcher, je tenais trop à l'allaitement. Je me disais que c'était peut-être difficile là, mais qu'éventuellement, ce serait plus facile. J'ai de bonnes amies qui allaitent ou ont allaité qui m'ont encouragée et comprise. Ma mère nous a allaités et elle m'a soutenue elle aussi. Je sais que bien des femmes se demandent pourquoi se causer autant de peine pour l'allaitement et je respecte leur choix. Mais pour moi, il n'y avait qu'un seul choix et c'était celui de donner mon lait à mon enfant. Abandonner n'a jamais été dans ma nature.

Je sais que je ne fais que commencer. Après tout, Tithom n'a que 3 semaines. Peut-être que d'autres temps durs m'attendent encore. Mais pour l'instant, l'allaitement me convient et je suis convaincue d'avoir fait le bon choix et d'avoir raison de m'être entêtée. Oui, c'est demandant. Ça ne peut être que moi qui lui donne le sein, que ce soit à 1h du matin ou en plein après-midi. Ça fait mal parfois, quand bébé est affamé ou que mes seins sont engorgés parce qu'il a trop dormi, mais ce n'est rien d'insuportable. Je ne pourrai pas sortir très longtemps, à moins de lui donner un biberon (de mon lait, bien sûr). Malgré tout, je suis encore persuadée que ça en vaut la peine. C'est ce qu'il y a de meilleur pour lui et c'est même bon pour moi. C'est toujours prêt, toujours disponible et à la bonne température. Un seul regard dans les beaux grands yeux bleus de Tithom et je SAIS que ça en vaut la peine.

6 commentaires:

  1. Je serai toujours là pour t'épauler, Kiwi.. tu sais qu'on a pas mal la même vision de l'allaitement et j'admire ta tenacité.
    C'est pas facile, et c'est pas si inné pour tous les bébés, et nous en tant que maman, ben c'est un apprentissage au quotidien...
    Les 6 premières semaines.. je l'ai répété souvent, mais c'est ça...
    et.. la plupart du temps, après, ça devient un automatisme... et ça devient pratique.. et ça DEVIENT naturel, comme on s'attendait à ce que ce soit...
    c'est probablement pour ça que 10 mois plus tard, je suis encore là à allaiter Raphaël à temps plein, et que les passes où j'ai envie d'arrêter ne durent que quelques minutes et viennent plus de la diète que de l'allaitement comme tel... enfin...

    Tout ça pour te dire que ça devient plus simple et plus agréable, avec le temps... Bébé vieillit, a un horaire, ca s'incruste dans notre routine comme les repas et les dodos...

    et c'est LE contact privilégié qui perdure, passé les 9 mois de grossesse... un moment magique, entre une maman et son bébé, qui redevient totalement dépendant d'elle...

    Cela dit, je comprends aussi de plus en plus celles qui décident d'arrêter.. Je me dis qu'il faut au moins y donner une petite chance, mais, faut pas s'en rendre malade!

    Tu vas réussir ma belle Kiwi.. et mon oreille t'est disponible 24h sur 24... n'hésite jamais à l'utiliser ;)

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  2. Pas grand chose à ajouter à ce que Tigrou a dit... Plus ça va aller plus tu seras contente d'avoir décider d'allaiter. Quel bonheur quand ça va bien... je ne pensais jamais dire ça, les 2 premiers mois, j'ai détester allaiter, c'était seulement de la douleur, des pleurs... mais maintenant, oui, je peux dire quel grand bonheur.
    Ça m'a touché de te lire... ça m'a rappelé des moments plus difficiles qu'heureusement, on fini par oublier.

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  3. C'est un contact magique....il vaut la peine de persévérer, juste pour vivre ce lien qui est si spécial.....tu parlais du picotement et que tu sens ton lait arriver....remarque bien...on a un 6e sens maternel....quand Pépin dors...et que tu sens une montée de lait...remarque bien qu'il se réveillera dans les minutes suivantes...on est relié...ton corps le sens que ton bb boira dans les minutes suivantes...c'est fou! ca m'a tellement étonné....c'est un contact prévilégié! dans peu de temps...tu ne te poseras meme plus de questions! tu n'y pensera meme plus non plus! tu va lever ton chandail, et continuer a manger, ou a écouter ton programme de télé :)

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  4. Je ne peux pas dire que je te comprends ma belle Kiwi, puisque je ne l'ai jamais expérimentée, mais tout comme toi, l'allaitement demeure très important pour moi. J'ai beau me documenter, c'est une partie qui me fait peur, puisque'elle m'est inconnue, mais il faut écouter son coeur...Je suis vraiment contente de savoir que tout a fini par bien tourner pour toi, et que bébé prenne maintenant les 2 seins. En passant, tout a fait hors sujet, je trouve ça cute a mort, Tithom !

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  5. L'allaitement et moi on ne fait pas bon ménage (mauvaise expérience)....mais je ne te dirai pas d'abandonner, c'est toi qui le sait.... et je suis certaine que tu fais ce qu'il y a de mieux pour toi et ton enfant.

    Il y a deux groupes de femmes dans l'allaitement, celles qui persévèrent et qui traversent les moments difficiles pour finalement trouver l'allaitement facile et naturel....et l'autre groupe qui persévèrent et abandonnent parcequ'elle souffrent trop et par le fait même, le bébé en souffre aussi...J'espère de tout coeur que tu fais partie du premier groupe!

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  6. Salut Kiwi,

    Wow, ça ramène vraiment en arrière de te lire. Ma grande a seize ans mais moi aussi tout comme toi mes seins étaient comme des ballons de football les premiers temps. La solution que j'avais trouvée était d'aller sour une douche chaude et de me masser les seins avec de l'huile pour les vider un peu et les ramollir avant de les présenter à ma fille. Je sais que ce conseil arrive un peu tard mais il pourra peut-être te servir pendant les périodes de croissance de Tithom lorsque la situation arrivera à nouveau!

    Bon courage et lâche surtout pas! Et te gêne pas pour manger une grande variété d'aliments car je crois fermement que c'est là que les enfants développent leur goût pour une alimentation variée ce qui facilité bcp la vie lors de l'introduction des aliments et quand ils grandissent.

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