14 septembre 2005

Des baleines

Ce soir, j'ai mon premier cours d'aquaforme prénatal. Ce soir, je passerai une heure en compagnie de plusieurs fertiles enceintes, volontairement, pour la première fois. Je fais un plat avec un rien? Peut-être, mais c'est mon seul moyen de défense. Je ne connais pas ces femmes. Je ne connais pas leur background, l'histoire de leur grossesse. Je sais par contre qu'un couple sur 10 vit des problèmes de fertilité et qu'une femme sur 4 vivra une fausse-couche (consciemment ou non) au cours de sa vie. Si nous sommes 10 dans le cours, ça voudrait dire que je serais la seule infertile et qu'il y aurait 1,5 autre femme ayant vécu une fausse-couche. Bref, je serai entourée de fertiles, que je le veuille ou non.

Qu'on ne le prenne pas mal, je n'ai RIEN contre les femmes fertiles. Qui suis-je pour les détester d'avoir seulement eu plus de chance que moi? Ce n'est rien de volontaire. Ce que je déteste, c'est ce que je ressens quand je suis en leur compagnie. Je me sens moins bonne, moins spéciale, parce que moi, je n'ai pas réussi rapidement, parce que moi, je ne suis pas capable de sauter dans les airs en tapant des mains et en pleurant quand j'apprends une nouvelle grossesse, que je connaisse la femme ou non. Je me sens plus endurcie, plus consciente de ma chance, mais ça, tout le monde s'en fout, au fond. Ça ne se voit pas. Pour elles, je serai une autre femme enceinte dans leur cours d'aquaforme. Que ça m'ait pris 3 ans à tomber enceinte, que j'aie eu à subir tous ces traitements et examens, que j'aie eu à vivre toute cette peine, cette rage et cette jalousie, ça ne change en rien le résultat: je suis enceinte, comme elles. Pour elles, je suis une des leurs. Pour moi, je suis une minorité, peu importe à quel point je voudrais être une des leurs.

Ce que j'appréhende de leur présence, c'est leur insouciance, leur façon de voir la vie en rose, de ne connaître que le beau côté de la reproduction. Je les envie pour ça, j'envie leur belle naïveté et leur aisance à se croire enceinte et maman dès le début. Je ne crois pas avoir droit ce soir à des commentaires insensibles (même si involontaires) qui viendront chercher l'infertile enragée endormie en moi. Mais je serai sur mes gardes, au cas où.

Malgré tout, j'ai hâte à ce soir. J'ai hâte de me mêler (oui oui!) à d'autres baleines, de pouvoir flatter ma bédaine sans me faire regarder de travers, de faire une activité pour moi et Pépin. J'ai hâte de prendre ce temps pour m'ocuper de moi et de ma bédaine, de partager ce qu'il y a de beau (et c'est fou comme il y en a du beau!) dans cette grossesse, de vivre une expérience de future-maman.

Ce soir, nous serons plusieurs baleines à la picine du quartier, flottant gaiement, notre bédaine sortant de l'eau comme un iceberg. Et je serai des leurs, même si ce n'est que pour une heure.

1 commentaire:

  1. Je ne sais pas si me comparer a toi pourrait t'insulter...je sais que je n'ai pas eu a prendre d'hormones, ni a vivre tout ce que tu as vécu, mais j'ai quand meme un suivi en infertilité, le matin que j'ai fait mon test, je partais pour Qc me faire endormir et ouvrir le ventre pour voir mon degré d'endometriose....j'ai tout de meme pendant 18 mois attendu et espéré, et été décue....tout ca pour te dire...que au moins, je comprend l'attente interminable que tu as vécu. et ma grande crainte est d'encore la vivre pour le prochain BB qui n'arrive pas....
    Grosse bise
    CR

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