Hier soir, je suis sortie au resto avec de vieilles amies que je vois rarement. Il n'y en a qu'une à qui j'écris plusieurs fois par semaine et que je vois plus régulièrement. Elle est la seule à qui je parle ouvertement de mes problèmes de fertilité, même si elle n'a jamais connu ça (elle a 2 enfants, conçus le premier mois d'essai). Elle est une des très rares personnes à être très sensible à ce que nous vivons, même si elle ne peut le comprendre concrètement. Avant le souper, elle m'a demandé si je voulais en parler ou non, de tout ça, avec les autres. Je lui ai dit que je préfèrais pas. Les deux autres filles savent que nous essayons, mais sans plus. Je leur en ai parlé probablement au début, alors que nous étions encore excités, croyant bientôt réaliser un rêve. Mais elles ne sont pas au courant de ce qu'il s'est passé dans la dernière année et demie. Elles ignorent tous les traitements que j'ai subis, la fausse-couche, les moments durs et les décisions déchirantes.
Bien sûr, comme nous sommes toutes allées au secondaire ensemble, on ne peut s'empêcher de parler des gens qu'on a connus pendant notre adolescence et ce qu'ils sont devenus aujourd'hui. Je n'avais aucun potin à rapporter, mais j'ai eu droit à une bonne poignée de nouvelles de grossesses, accouchements et bébés. J'ai même eu droit à l'histoire de cette femme que je ne connais pas, qui a rencontré un homme et est tombée en amour. Ils ont décidé d'avoir des enfants. Après 4 ans d'essais et un suivi en fertilité, ça a finalement fonctionné. L'homme a eu peur et a laissé la femme. Comme elle ne se voyait pas élever un enfant seule, elle s'est faite avorter et a appris qu'elle portait des jumeaux. En quoi cette histoire peut m'être utile? Qu'est-ce que c'est supposé m'apporter? J'en ai encore mal au coeur juste d'y penser.
Quand le sujet s'est tourné vers moi et qu'on m'a demandé où nous en étions, j'ai seulement répondu "nous en sommes au même point. Je n'aime pas en parler, alors svp changeons de sujet." Je n'ai pas été bête, j'ai simplement été claire. Elles ont semblé comprendre et me respecter. Ce que je ne comprends pas, c'est que la conversation a tourné autour de la grossesse et des enfants toute la soirée. Mon malaise était pourtant très clair et mon manque de participation à ces conversations assez évident. Je suis vraiment déçue que mes amies n'aient pas fait preuve d'autant de sensibilité que les connais capables. Je suis déçue de ne pas avoir pu, le temps d'une soirée, échapper à ce monde d'infertilité et d'injustice.
Sincèrement, je m'en fous des nausées d'une telle et du prénom du futur bébé de telle autre. Je m'en fous que celle-là soit sur le point d'accoucher et que telle autre a réussi à tomber enceinte le mois où elle a décidé de laisser tomber (seigneur, je suis pus capable d'entendre cette phrase-là!!!). Je me fous de ces gens qui ne font plus partie de ma vie depuis plus de 10 ans. Je ne leur souhaite pas de malheur, je souhaite simplement ignorer leur bonheur pour ne pas me sentir encore plus mal que je ne me sentais déjà. Ce que tu ne sais pas ne te blesse pas, non?
Je n'ai pas besoin de me faire dire de ne pas lâcher, je n'ai pas besoin de me faire dire que ça a fonctionné pour la belle-soeur de ton facteur. Je n'ai pas besoin de me faire prendre en pitié. J'ai seulement besoin de me faire respecter. Je ne m'attends pas à ce que les gens qui ignorent tout de notre histoire soient sensibles à ce qu'ils ignorent. Mais je m'attends quand même à un minimum de sensibilité venant des gens qui savent que nous vivons des moments difficiles et que je ne veux pas en parler.
Quand je suis revenue, en compagnie de mon amie qui sait tout et qui m'apporte beaucoup de soutien, elle m'a demandé "étais-tu aussi tannée que moi des conversations de bébé?!" Merci mon amie.
23 avril 2005
S'abonner à :
Publier des commentaires (Atom)
Aucun commentaire:
Publier un commentaire