20 avril 2012

Naissance d'un troisième mousquetaire

Ma date prévue d’accouchement est arrivée sans grande surprise. Sans grande surprise non-plus, j’étais encore dilatée seulement à 1,5 cm. Je m’attendais à ne pas accoucher avant, comme pour mes deux autres garçons. Mon docteur ne semblait pas stressé non-plus et n’a pas parlé induction à mon rendez-vous de 40 semaines. Il m’a demandé si j’avais accouché naturellement de mes deux autres, s’ils avaient été en retard et si ça avait été rapide. Il m’a tout de même demandé de revenir deux jours plus tard pour une échographie, question de s’assurer que tout était encore ok pour attendre une semaine de plus.

Je suis donc allée à l’hôpital vendredi le 9 septembre. Une écho de routine, où je n’ai pas pu admirer le profil ou les petites mains de mon bébé. J’ai vu une tête, une jambe (je crois?), sans plus. Le doc a pris des mesures et m’a dit que tout était ok. Je devais prendre un autre rendez-vous pour la semaine suivante. Par curiosité, je lui ai demandé le poids estimé, lui disant que mon deuxième pesait presque 10 livres à la naissance. Il m’a dit que celui-là serait plus petit que ça, puis a regardé ses mesures et rajouté “Autour de 9 livres”.

Nous avons essayé de bouger pas mal la fin de semaine suivante, espérant du coup faire bouger les choses. Avant-midi aux portes ouvertes des fermes, à marcher dehors. Aucune contraction. Niet. Même si je ne me décourageais pas, je commençais à m’impatienter. Je ne voulais pas d’induction, pas d’intervention. Je voulais que bébé décide, mais à chaque jour qui passait, je voyais les chances que cela se produise diminuer un peu.

Le mardi suivant, le 13, j’ai décidé de prendre mon avant-midi pour relaxer et ne rien faire. Mes commandes étaient terminées, j’étais à jour dans tous mes trucs. Je me suis écrasée et j’ai regardé la télé. Et j’ai eu des contractions. Rien de douloureux ni régulier, mais tout de même plus fréquent que les jours précédents. À chaque fois que j’allais à la toilette, je scrutais le papier, à la recherche d’une trace de bouchon, signe que mon col s’ouvrait. Rien. Mais les contractions ont duré, de façon intermittente, toute la journée. Quand je suis allée chercher Tilou à l’école, une autre maman me dit “encore là toi?!” et je lui ai répondu que ça commençait à travailler, enfin. Le soir venu, j’ai dit à Hom que j’avais commencé à avoir des contractions plus fréquentes. Il s’est mis à stresser, certain que ça y était. Je lui ai dit de relaxer, que ça voulait seulement dire que ça approchait. Mais j’étais certaine que c’était encore une question de jours et non d’heures.

Ce soir là, bébé gigottait tellement dans mon ventre, c’était fou! Des grosses bosses qui bougeaient, des pics pointus qui sortaient… j’avais l’impression qu’il essayait de se tourner. Nous regardions la télé en fin de soirée quand Hom a décidé de chronométrer mes contractions (vers 22h20). Il trouvait qu’elles étaient soudainement plus fréquentes. Et moi, secrètement, je les trouvais un peu plus pesantes, mais pas encore douloureuses. J’étais aux 10-12 minutes. On a décidé d’aller nous coucher, espérant faire des réserves d’énergie pour une journée d’accouchement le lendemain ou surlendemain. Comme nous nous trompions! J’étais aux 10 minutes, puis aux 3 minutes, 6 minutes… À chaque fois qu’elles s’espaçaient, je me disais “ouf, c’est arrêté, je vais pouvoir dormir.” J’étais si fatiguée, j’avais mal au coeur, je ne me sentais pas du tout en forme pour accoucher là, là! Mais vers 23h20, elles étaient aux 2 minutes et ça ne changeait plus. C’était rapide, c’était inconfortable, c’était déroutant. Je devais me faire à l’idée: j’allais accoucher. Hom n’avait pas besoin d’un signe de ma part pour savoir quand commençait et se terminait une contraction: il le savait au son que je faisais en soufflant. J’ai essayé de prendre les contractions couchée, avec un oreiller entre les genoux, en soufflant. Ça allait bien, mais je sentais que ça irait en empirant assez rapidement. Hom a donc appelé l’hôpital. L’infirmière voulait me parler directement. Elle m’a demandé si mes contractions étaient douloureuses. Je me disais que ce n’était pas si pire, mais oui, selon moi, ça s’en venait. Elle m’a demandé si j’avais essayé de prendre un bain chaud. Je lui ai répondu que je n’avais pas osé, parce qu’à mon dernier, ça avait beaucoup accéléré les choses. Elle a dit “Viens-t-en, on t’attend.” Nous avons donc appelé mon père. J’arrivais à parler et bien fonctionner entre les contractions. Mon moral était bon, je ne me sentais pas encore dépassée par la douleur ou les changements qui s’opéraient dans mon corps. Je faisais même des blagues entre les contractions. Nous avons terminé les bagages, je me suis habillée. Je suis allée donner un bisou à mes deux grands, qui allaient bientôt accueillir un nouveau petit frère.

La copine de mon père est arrivée et nous sommes partis. Hom avait placé des piqués sur son siège d’auto, au cas où je crèverais mes eaux. Les quelques premières contractions assise étaient plus difficiles à prendre, mais c’était moins pire qu’à Tilou. Je trouvais tout de même la route longue! J’ai regardé l’heure sur la 132, en flattant ma bédaine pour une des dernières fois: 23h55. Mon petit allait donc naître le 14 septembre. J’ai dit à mon ventre que c’était fini, que ça allait bien aller. J’étais nerveuse, mais je n’avais pas peur.

Nous sommes arrivés à l’hôpital vers minuit et dix. Hom m’a laissée à la porte principale, après ma contraction, et est allé stationner la voiture. Je suis donc entrée seule dans l’hôpital qui semblait vide. Deux gardes de sécurité parlaient entre elles. Je leur ai demandé où était l’ascenceur. Elles m’ont demandé si c’était pour accoucher, j’ai dit oui. Elles m’ont offert une chaise roulante, que j’ai refusée en disant que je préférais prendre les contractions debout. Elles semblaient incertaines. Je leur ai dit que mon conjoint s’en venait et je me suis dirigée vers les ascenceurs. La porte s’est ouverte, j’ai appuyé sur le bouton numéro 3 et je suis montée. Ça allait bien, les contractions se prenaient bien en marchant.

Je suis arrivée au comptoir d’accueil. C’était si silencieux! L’infirmière m’attendait et m’a dirrigée au triage. Elle m’a demandé de faire un test d’urine (pourquoi, je l’ignore) et de mettre la chemise d’hôpital. Quand je suis sortie de la salle de bain, Hom était arrivé. Je me suis étendue sur le lit pour que l’infirmière m’examine. Mes contractions étaient toujours aussi fréquentes et pesantes. Mais couchée, c’était plus difficile de les traverser en soufflant. Ça me faisait très mal dans le bas du dos. Ça élançait dans les jambes. J’arrivais à les contrôler en poussant avec mes bras de toutes mes forces. J’étais très inconfortable sur le lit. L’infirmière a installé le moniteur du bébé et celui des contractions. Elle m’a posé toutes sortes de questions. Quand j’avais une contraction, tout mon corps se contractait. C’était ma façon de les traverser. Elle me disait de garder mes fesses molles. Facile à dire! Ça me semblait une éternité. Elle ne m’avait même pas encore examinée! Je voulais me lever, marcher, traverser les contractions en bougeant, pas dans le lit. Après peut-être 30 minutes de gossage, elle a fini par m’examiner le col. C’était insupportable! Surtout lorsque j’ai eu une contraction en même temps. Elle ne semblait pas certaine. Selon elle, j’étais à “7 plus”, mais elle voulait l’avis de sa supérieure. Je devais donc encore rester couchée et attendre. Quand sa supérieure est finalement arrivée, elle a confirmé que j’étais à 7 plus. Elles m’ont donc admises. J’allais accoucher. Et pouvoir me lever!

Une fois les moniteurs enlevés, je me suis levée. Une contraction m’a prise par surprise. Je ne savais plus comment les traverser! J’avais l’impression de soudainement perdre le contrôle. Ce n’était plus pareil. Au lieu d’être dans mon ventre ou mon dos, c’était maintenant dans mon col. Je ne savais plus comment me placer, comment bouger, comment respirer. L’infirmière m’a dirrigée à ma chambre d’accouchement. J’ai eu une contraction en chemin, mais je ne voulais pas arrêter. Je voulais juste me rendre à ma chambre, rapidement. Arrivée dans la chambre, une autre forte contraction m’a surprise. Je ne savais plus comment respirer, j’avais perdu le contrôle, c’était trop intense. Je sentais que ça poussait, très fort. J’étais certaine que ça y était. Je disais “ça pousse, ça pousse!” en m’aggripant aux bras de Hom. Les infirmières étaient un peu incrédules. Elles me disaient de bien respirer, de relaxer, de ne pas serrer les fesses. Je voulais juste pousser! Elles m’ont demandé de m’étendre sur le lit, pour m’examiner. Le lit était tellement haut et personne n’a pensé le baisser pour m’aider. Il a fallu que Hom me prenne (presque) pour que je puisse me coucher. C’était maintenant tellement intense que je criais. J’étais complète, mais ma poche des eaux était encore intacte. À ce que Hom m’a dit, les infirmières avaient l’air paniquées. Le docteur était introuvable. La poche sortait un peu. Elles ne savaient pas quoi faire. Elles me répétaient de ne pas pousser, de bien respirer, de garder les fesses molles. Ne pas pousser! Franchement! Comme si j’avais le contrôle là-dessus! Bébé poussait tout seul, je n’y pouvais rien. Je criais, ça faisait mal, c’était hors de mon contrôle. Je me retenais du mieux que je pouvais, mais je sentais que je n’y arriverais pas très longtemps.

J’ai senti un peu de liquide chaud couler. Mes eaux. Bébé arrivait, docteur ou pas. Heureusement, un docteur qui était en césarienne est venu à la rescousse des pauvres infirmières paniquées. Elle m’a dit “quand tu sens que ça pousse, vas-y, pousse!” Et bizarrement, je me retrouvais entre deux contractions, à reprendre mon souffle, à me recentrer. Puis la poussée s’est faite sentir. J’ai poussé de toutes mes forces, mais je savais que je ne faisais qu’aider bébé qui faisait déjà une bonne partie du travail lui-même. Ça brûlait. Je sentais sa tête passer. Puis tout son corps, d’un seul coup. Une seule poussée et il était là! Il est né à 1h03. J’ai entendu le docteur dire qu’il avait 3 tours de cordon. Hom a dit qu’elle avait dû l’attraper tellement il est sorti rapidement. Elles l’ont déposé sur moi et je l’ai trouvé si beau, mais si petit! J’ai soupiré “seigneur!”, pleine de surprise, n’arrivant pas à croire que ça avait été si rapide encore une fois. J’ai dit à Hom “il est petit!” Il m’a dit que je les trouvais toujours petit. Non, non, il est petit, je te dis! Mais si beau. Si beau!

Quand le temps de la pesée est venu, on a bien vu que j'avais raison: bébé pesait 7 livres 10 onces. Un bébé bien normal, j'en conviens, mais si petit quand on s'attend à un patapouf de 9-10 livres!

Il a par la suite bien pris le sein. J'étais heureuse, fatiguée et euphorique à la fois. J'étais maintenant maman de trois garçons. Moi! Maman trois fois! Qui aurait cru cela possible, il y a 7 ans...

2 commentaires:

  1. C'est beau de te lire!!! Félicitations encore une fois! ;)

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  2. Ce que j'aime lire les récits de naissance, je suis toujours aussi émue...

    Et en effet, qui aurait cru tout ça il y a 7 ans...
    Beaucoup de tristesse et de douleurs qui auront au moins servi à rendre ton bonheur plus fort.
    Parce que je continue de penser que quand on a attendu plus que de raison, on savoure davantage...

    Merci Kiwi !!

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