Ce matin-là, je me suis réveillée avec une drôle de sensation, comme s'il me manquait quelque chose. Je me suis réveillée avec un creux au ventre que je sentais presqu'inconsciemment. Une cassure s'était effectuée et j'essayais de l'ignorer, en la repoussant au fin fond de ma tête. J'avais été si bien, si heureuse les jours précédents. Je ne voulais pas, je ne pouvais pas ne pas être heureuse ce matin-là.
Et pourtant, c'était bien vrai. Je ne le sentais plus. Je ne le vivais plus. Comme si on avait coupé un fil invisible et que je n'arrivais pas encore à mettre exactement le doigt sur ce que je ressentais. Même si mon bébé était encore trop petit pour que je sente vraiment sa présence, mon coeur ne le sentait plus. Plus de lien minuscule, plus de bonheur, plus de tendresse à faire exploser mon corps. Je me sentais vide bien avant de savoir que je l'étais vraiment.
Au-delà du sang, des pleurs, des cris de douleur, c'est le vide qui a marqué ma mémoire. Profondément, je le ressens encore. Pas comme un vide présent, me suivant à chaque pas. Non, je le ressens plutôt comme un souvenir inscrit très fort en moi, comme un parfum dont on se rappelle longtemps après qu'il soit disparu. Je me rappelle ce vide, ce grand vide, très clairement. Je me rappelle la rage qui essayait de le remplir. Je me rappelle la grisaille, la peine, la douleur, mais c'est le vide qui revient, année après année. Car de tous ces souvenirs, seul le vide a disparu de ma vie. Je ressens encore parfois de la peine, de la douleur, de la grisaille, mais jamais plus de vide. Ma vie est remplie, mon coeur est remplie. Jamais plus je ne ressentirai ce vide qui m'avalait comme un trou noir.
Bizarre, comment je ne parle de ma fausse-couche qu'à son "anniversaire". Bizarre comment, 5 ans plus tard, mes souvenirs de ce jour sont si peu altérés, comment j'arrive encore à me remettre dans mes souliers d'autrefois et revivre l'impression qu'a laissé cette perte dans ma vie, comme on peut replacer son pied dans une trace de pas, dans la neige.
Cinq ans, déjà. Je suis à des années lumières de celle que j'étais, ce jour-là. À des années lumières, et pourtant encore souvent si près, bien malgré moi...
Je ne pense plus à ce bébé pour "ce qu'il aurait pu être", mais pour "ce qu'il a été": un virage inattendu, une grosse blessure, un dur retour à la réalité, un apprentissage. Et un rêve éphémère.
Les années passées, je n'y avais pas tant pensé. Cette année, j'ignore ce qui est différent, mais j'y pense très souvent depuis quelques jours. Je me repasse le film des jours qui ont précédé la fausse-couche. Je me remémore l'euphorie, le bonheur du début de grossesse. Et je me surprends à vouloir revivre ce mélange de légèreté et de plénitude. Je me suprends, mais pas tellement. Ça fait un bout de temps que j'ai hâte de retomber enceinte, mais depuis quelques semaines, cette hâte s'est presque changée en urgence. Mon ventre disfonctionnel m'appelle, me supplie presque. Et c'est cet appel qui vient me chercher dans mes souvenirs et qui essaie de me tirer vers l'avant. Mais je patiente, encore, juste un peu.
En attendant, je regarde le ciel, cherchant du regard ma petite étoile filante qui aura 5 ans dans quelques jours...
3 décembre 2009
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une fausse couche
RépondreEffacerest un reve envoler , une douleur qu on garde souvent pour nous
une blessure qui guérit mal
c est un deuil , malgré que ce petit etre a ete que de passage dans nos vie ,nous y penserons a vie
c est normal :)
prends le temps d'accorder cette journee a tes souvenirs xx
prends soin de toi
titemarie
qui a 5 bebe qui veilles sur eux
Un gros câlin pour toi, et des millions de bisous à ce petit ange.
RépondreEffacertrés émouvant...gros calin a toi!
RépondreEffacerPas exactement la même histoire, pas les mêmes circonstances... Mais la même impression de déjà-vu et la même douleur.
RépondreEffacerEt, espérons-le très fortement, le même dénouement heureux, un jour. :)
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