19 mars 2008

Longue histoire courte

Mardi le 11 mars, mon médecin me disait, encore une fois, qu’aucun travail n’était fait. Comme j’avais dépassé ma date prévue d’accouchement, il me donnait rendez-vous la semaine suivante pour parler induction. Si le bébé ne voulait pas sortir de lui-même, nous allions devoir l’aider.

J’étais déçue, c’est certain, de devoir passer par l’induction. Mais je m’étais faite à l’idée et je restais zen. J’allais voir mon fils d’ici une semaine.

Jeudi, dans l’après-midi, je vais à la toilette et je suis surprise de découvrir un peu de bouchon muqueux sur le papier. Eh bien, on dirait que mon col travaille. Je sais que la perte du bouchon en soi ne veut pas dire grand chose, mais je suis quand même contente de savoir que mon col a décidé de se préparer un peu. Ce qui se fait tout seul n’aura pas à être fait le jour de l’induction, après tout.

Vendredi, je perds plusieurs autres morceaux de bouchons. Les contractions que j’ai depuis la 18e semaine de grossesse et qui ne servent à rien changent un peu. D’un simple serrement de ventre, elles sont maintenant accompagnées d’une lourdeur un peu inconfortable. Rien de douloureux et surtout pas régulier, mais je m’en réjouis quand même.

Mon chum avait pris congé pour deux jours de la semaine suivante, espérant se reposer avant l’induction. Il est entré plus tôt vendredi. Il va faire une petite épicerie et apporte à souper. Nous mangeons en famille, ignorant que ce sera notre dernier repas à 3. J’ai des contractions plus fréquemment, mais encore de façon très irrégulière. Je prends un bain avec Tithom et elles semblent arrêter. Nous couchons Tithom pour la nuit et descendons regarder un peu de télévision. Mes contractions se font plus fréquentes, entre 12 et 6 minutes d’intervale, mais diminuent lorsque je me couche sur le côté gauche.

Je vais au lit vers 22h. Je dors sur le côté gauche, me faisant réveiller de temps en temps par une contraction. Elles sont un peu plus douloureuses, mais je les contrôle en respirant, à moitié endormie, et je me rendors entre chacune. Puis, graduellement, je me rends compte que j’ai de moins en moins le temps de me rendormir entre mes contractions. Je réveille Hom et lui demande de calculer. Il est 1h du matin. Mes contractions sont aux 4 minutes. Après 20 minutes sans changement, je me fais couler un bain chaud. C’est très difficile de supporter les contractions dans une position semi-assise dans le bain, mais j’y reste quelque temps. Elles passent à 3 minutes, puis rapidement à 2 minutes. Elles durent une minute et deviennent de plus en plus douloureuses. J’essaie autant que possible de bien respirer, mais c’est de plus en plus difficile. Je sens que ça pousse et je vais à la selle plusieurs fois. Hom appelle la maternité de l’hôpital. La dame veut me parler. Elle me dit que comme ç’a été long pour mon premier et que je n’avais aucun travail de fait mardi, je suis probablement mieux de faire encore une heure chez nous, plutôt qu’à l’hôpital. J’accepte, un peu à reculons. Je ne me vois pas endurer tout ça encore une heure, mais je comprends que ça ne donnerait rien de plus de le faire à l’hôpital.

Quinze minutes plus tard, j’ai changé d’idée. Je n’en peux vraiment plus. C’est insuportable, je ne peux pas croire que ça va durer encore des heures comme ça. Hom appelle mon père et sa conjointe, qui viendront garder Tithom chez nous. Nous prenons une dernière photo du bedon et je m’habille pendant que Hom termine la valise. À chaque contraction, nous devons tout arrêter. Je me pends au cou de mon chum, je souffle, je souffre. La seule façon pour moi de supporter les contractions est au cou de mon amoureux, sur la pointe des pieds, les jambes bien tendues, tous les muscles contractés en même temps.

Mon père et sa conjointe arrivent. Nous partons, après nous être arrêtés 3 fois entre la chambre et la porte d’auto parce que j’avais des contractions. Les conditions sont laides, la route est glissante. Heureusement, elle est aussi déserte. Hom roule prudemment, mais ne fait qu’un arrêt aux lumières rouges. Mes contractions deviennent rapidement horriblement douloureuses. Ça pousse, ça fait très mal dans mes jambes et comme je suis assise, je n’ai aucune façon de faire passer le mal autrement qu’en criant, en tirant sur la poignée au-dessus de la porte. Je m’y pends à chaque contraction, je me perds dans la douleur, je n’arrive plus à respirer. Quelque chose a changé, ça ne peut pas être aussi douloureux et ne pas être imminent. Mais en même temps, je me dis que je dois être autour de 4 ou 5 cm, puisque je n’ai pas crevé mes eaux. C’est pour moi inconcevable d’être plus avancée en si peu de temps et surtout, d’imaginer vivre tout ça encore des heures. Si ça me fait aussi mal là, qu'est-ce que ce sera quand j'aurai crevé mes eaux? À chaque contraction, une seule idée vient innonder mon esprit: la péridurale. Je la veux, je veux être libérée, je veux reprendre le dessus. Je me fous de mes beaux principes, je veux arrêter de souffrir. Je ne peux imaginer ce que seront mes contractions une fois les eaux crevées. Je n'ai plus le contrôle et je veux le reprendre.

Le chemin me paraît très long. Chaque bosse dans la route me fait très mal. J’ai l’impression que mon ventre bouge comme s’il était rempli d’eau. Nous arrivons finalement à l’hôpital. Je regarde l’horloge de la voiture une dernière fois. Il est 3h05 du matin. Nous sortons de la voiture, j’ai une contraction. Nous marchons vers l’entrée, nous arrêtant à chaque contraction. Il fait très froid, mais ça me fait du bien. L’entrée est barrée, nous devons entrer par l’avant de l’hôpital. Une bonne marche au froid, entrecoupée de contractions de plus en plus douloureuses et rapprochées.

En entrant dans l’hôpital, le gardien de sécurité m’offre une chaise roulante, que je refuse entre deux respirations. Je veux rester debout, c’est la seule façon que j’ai de passer les contractions sans hurler. Un gentil monsieur tient la porte de l’ascenceur ouverte pour nous, mais Hom lui dit de ne pas nous attendre car ça risque d’être long. Après ce qui me semble une éternité, nous arrivons à la maternité. Il n’y a personne au triage. La panique commence à me gagner. Mes contractions sont collées, douloureuses et je sens une énorme pression dans mon bassin, qui m’élance dans les jambes.

Une infirmière me dirige vers un des lits du triage et me demande de me déshabiller pour mettre la chemise d’hôpital. Les contractions m’empêchent de focusser, ce qui rend l’infirmière impatiente. Elle me force à me coucher. Je m’accroche au manteau de Hom. Il me dit de bien respirer, de faire mes fut-fut-fut pour ne pas pousser. L’infirmière m’examine et me dit “vous êtes complète.” Je m’écris “hein?!” Elle dit à une autre infirmière d’appeler le médecin, que je dois être transférée immédiatement en salle d’accouchement car je suis complète, mes membranes ne sont pas rupturées et bébé est encore haut. Elle me répète que je suis complète, je répète “hein?!” Dans ma tête, c’était pour moi impossible d’être rendue si loin, si vite, sans même avoir crevé mes eaux.

On me transfert sur une chaise roulante, ce qui me fait crier de douleur. On me dit que je ne dois pas rester debout et que je ne dois surtout pas pousser. Mon chum me dit doucement de bien respirer, que nous allons avoir un bébé très bientôt. Je n’y crois pas. Je suis dans une bulle, dans la brume, trop d’idées se bousculent dans ma tête.

On m’installe sur le lit. À chaque contraction, je tire le chandail de Hom, je m’accroche à ses bras, son cou, je veux qu’il me tienne. Le médecin arrive et romp mes membranes. Je sens le liquide chaud couler entre mes jambes. Ça y est, c’est le point de non-retour. C’est vraiment vrai, je vais accoucher là, maintenant. Il me dit de pousser dès que je sens que ça pousse. Ça me prend quelques secondes pour retrouver mes esprits et me concentrer. Mes pensées se contredisent. Je veux pousser pour me libérer, mais je ne veux pas pousser car j’ai peur. Je pousse de toutes mes forces, malgré la douleur. J’entends “la tête est là, continue!” Je pousse encore. Ça brûle, mais c’est beaucoup moins insuportable que les contractions. Une autre poussée. Hom me dit qu’on en est maintenant aux épaules. Une poussée. Un cri. Encore une autre poussée et je sens le corps de mon bébé sortir du mien et glisser entre mes jambes. Le mot délivrance n’aura jamais eu autant de signification qu’à ce moment-là.

On dépose sur moi un bébé tout rond, qui ouvre ses yeux vers moi. Il est beau, il est là, dans mes bras, déjà. Mon fils est né le 15 mars 2008, à 3h47 du matin. Je regarde Hom, incrédule. Déjà? C’est déjà fini? Je n’arrive pas à croire que tout s’est déroulé si rapidement et, malgré la douleur, si bien. Au fait, j’ai déjà oublié la douleur. Le bonheur immense, l’incroyable sentiment de puissance et de force ressenti au moment de la naissance de Tipépin ont déjà tout effacé.

Je tiens toujours mon bébé dans mes bras. Les infirmières l’essuient, il me regarde. Je délivre le placenta, puis le médecin me pique et me recouds car j’ai déchiré un peu. Je n’ai d’yeux que pour mon fils et pour mon chum, que je remercie d’avoir été si patient avec moi. Je me sens en pleine forme, je n’ai pas l’impression de venir d’accoucher. Je suis si heureuse, si sereine. Mon bébé est en pleine santé, il est tout rond et beau comme son grand frère.

Comme nous sommes tous curieux, une infirmière le pèse finalement. Il pèse 9 livres et 12 onces (4,4 kilos), mesure 54 cm et son tour de tête est de 37 cm. Je n’arrive pas à croire qu’un si gros bébé soit sorti de mon corps aussi rapidement!

Je le mets au sein très rapidement et il le prend comme un pro. Qu’il est beau! Que je me sens bien!

On me transfert à ma chambre quelque temps après. Je suis impressionnée de pouvoir me lever et marcher aussi aisément. Je ne ressens aucune douleur, seulement un peu de fatigue, vivement combattue par l’adrénaline.

Au cours de la première journée, je dois avoir dit 200 fois à Hom que je n’y crois pas, que ça ne se peut pas avoir accouché aussi rapidement, que ça avait été si long pour Tithom... J’ai l’impression de rêver et pourtant, il est bien là, dans le creux de mon bras, mon petit garçon.

23 commentaires:

  1. Félicitations! Il est magnifique ton petite homme! Il a l'air si calme...

    J'ai des frissons tellement ton récit est émouvant! C'est quelque chose hein accoucher aussi rapidement! Tu trouves pas que nos histoires d'accouchement de nos petits 2e se ressemblent drôlement, ambulance en moins pour toi ;)

    Félicitations encore une fois! Profite bien de ton petit loup et de ta famille nouvellement agrandie :)

    xxx


    PS: J'ai hâte de savoir le nom de ton mignon ;)

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  2. Félicitations! Un super bel accouchement! Un magnifique garçon! Bravo!

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  3. Toutes mes félicitations pour le petit homme! Il est magnifique!!!!

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  4. Wow! Assez différent du 1er!!
    Ça m'a fait penser à mon 1er accouchement: quel bonheur de ne pas crever les eaux!!
    Toutes mes félicitations, je suis particulièrement contente pour toi que ton corps ai réussi ça tout seul comme un grand.

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  5. Hala lalalalala

    Je rêve donc d'avoir un travail sans crever mes eaux!!! Mais non, moi je commence mon travail par cela! Et ma sage femme m'a toujours dit que perdre les eaux en débuts de travail, ne se termine que rarement par un accouchement naturel! puisque la poche d'eau sert de tampon entre la tête et les os du Vagin.
    Chanceuse va! tu le mérites de toute facon!
    Tu as toujours rushé fort pour toutes les autres étapes...ca allait de soit qu'une d'entre elle te soit un cadeau!

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  6. Wow Félicitation encore, ton récit m'a donné des frissons et je dois dire que j'ai eu la larme à l'oeil. Il est très migon et c'est vrai qu'il ressemble à Tithom.

    Katine
    xox

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  7. Il est superbe!
    Mais dis donc, heureusement que tu n'as pas attendu plus longtemps à la maison!!
    Félicitations et merci pour ce superbe récit.

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  8. Encore une fois, félicitations!

    Il est magnifique ton deuxième petit homme!

    C'est un super beau récit, ca m'a donné encore plus hâte :p

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  9. Ouf...quel accouchement! C'est fou la force de la naissance.

    Un beau récit, un beau garçon et plein de tendresse pour Kiwi et ses hommes...

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  10. Ton récit est vraiment émouvant. C'est comme si nous étions là!

    Il est si joli ton Tilou.

    9 lbs 12 oz, je te lève mon chapeau!

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  11. Oh quel beau Tilou !
    Et que dit Tithom ?

    Quel beau récit, je suis devant mon ordinateur et mes larmes coulent sans s'arrêter !
    Merci pour tes mots, et encore bravo...

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  12. Wow, c'est une belle histoire... :o)

    Et il est magnifique, Tipépin! :o)

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  13. Félicitation pour ton beau tilou, Kiwi !!! Ah que tu me donnes envie d'accoucher, là !!!

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  14. Oh.. j'ai adoré lire ce récit si émouvant !

    Toutes mes félicitations pour ce beau poupon !!!

    Nadine xx

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  15. Ils se suivent vraiment de très près nos deux petits bonhommes! Je te félicite Kiwi et je suis heureuse de lire que ton accouchement s'est bien déroulé. Ça permet de récupérer plus vite... J'espère que ton chum est à la maison avec toi pour les premières semaines... Dans mon cas, mon chum est là et avec une grande soeur et un nourisson, nous ne sommes pas de trop à deux pour faire toutes les tâches familiale! Ton garçon est tout beau et quel gros bébé! Félicitations!

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  16. C'est touchant de te dire kiwi! Il est super beau ton tilou, il ressemble à son grand frère!! Félicitations encore à toute ta petite famille!xx

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  17. Que c'est émouvant de te lire!

    Et encore une fois....quel beau bébé! Félicitations!!!! xxx

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  18. Oh!!! Tilou est aussi mignon que son grand frère :)
    Toutes mes félicitations, et tu as réussi à me tirer encore quelques larmes! :)
    Profite bien de ta petite famille, cest si précieux!

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  19. Bienvenue à Tilou et toutes mes félicitations à toi Kiwi!

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  20. Quel merveilleux accouchement! Félicitations! Tipépin est un bébé magnifique.

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  21. @dodo: Merci! C'est vrai que nos histoires se ressemblent! Et c'est pas la première fois... ça commence à être weird! ;)

    @Kay: j'avais crevé mes eaux en début de travail à Tithom. Et même si les contractions étaient beaucoup plus intenses après les avoir crevées qu'avant, elles n'étaient tellement rien comparativement à celles de cet accouchement-ci! Mais je comprends très bien ce que tu veux dire... et c'est dommage qu'on ne puisse pas "contrôler" cette rupture spontannée.

    @Nada: en effet, on se suit de près! Et c'est bien vrai, j'ai récupéré beaucoup plus rapidement cette fois-ci. J'ai aussi la chance d'avoir mon chum avec nous pour quelques semaines, ça fait toute une différence!

    @ tous: MERCI! Vraiment, vos bons mots et votre soutien constant me touchent beaucoup.

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  22. Encore en retard...en retard partout dans mes lectures ces temps-ci...Toutes mes félicitations!

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  23. Félicitation pour ce beau poupon, il est magnifique!!!

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