12 février 2007

Insomnie et imagination

Aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours eu de la difficulté à m'endormir. Le soir, je me couche, fatiguée, mais je ne m'endors pas. Mon corps est las, mais ma tête semble profiter de ce calme, de ce silence et de cette noirceur pour se réveiller et faire du ménage. Mes idées se classent, je passe en revue ma journée, je décortique certaines conversations... C'est quand je veux dormir que ma tête, fatiguée mais workaholic, décide de me jouer des tours. Quand elle semble vouloir trop travailler et que les heures s'écoulent sans que je ne m'endorme, je me raconte des histoires. J'ai développé l'art de divertir ma tête, de lui changer les idées afin de l'endormir. Ça prend beaucoup d'imagination, mais ça fonctionne.

Je me suis conté toutes sortes d'histoires, pour m'endormir. J'ai souvent été riche et en voyage, ou bien j'avais une grande maison où il ne faisait jamais froid, avec une piscine et des fruits frais à volonté. J'ai été journaliste, chanteuse, archéologue, danseuse de ballet. J'ai rencontré mes idoles, gagné des prix, joué de tous les instruments, vécu au Moyen âge, voyagé dans l'espace.

Puis, pendant longtemps, je m'imaginais maman. Je me voyais avec un bébé dans les bras, le berçant doucement. Je me voyais nager dans un lac, avec un gros ventre. Je me suis imaginée des centaines de fois faire un test de grossesse positif.

Je ne me conte plus ces histoires, car elles n'ont jamais été aussi belles que celle que je vis à tous les jours avec Tithom.

Mais ces temps-ci, le soir, quand la lumière est éteinte et que je me retrouve seule avec mes pensées qui divaguent, je me raconte l'histoire de celle qui a des enfants facilement. Je m'imagine tomber enceinte sans même essayer, je m'imagine être enceinte de triplés, pouvoir planifier mes grossesses, jouer avec le feu et découvrir deux semaines plus tard que ça a porté fruit.

Je ne veux pas être de celles qui se plaignent de ce qu'elles n'ont pas et ne profitent pas de ce qu'elles ont. Ce n'est pas du tout le cas, en fait. Je suis à tous les jours extrêmement reconnaissante d'avoir Tithom dans ma vie. Je suis parfaitement heureuse. Parfaitement, enfin, sauf un tout petit mini morceau de casse-tête qu'il manque... rien qui nuit à mon bonheur quotidien, mais un morceau qui complèterait bien ma vie, nos vies, notre bonheur.

Le soir, quand seules mes pensées résonnent dans la nuit, c'est ce petit rêve de devenir maman une deuxième fois qui ressort, qui vient me chercher. J'ai souvent répété avoir fait le deuil d'un bébé "conçu avec spontanéité", mais il y a des soirs où j'en doute un peu. Ça me rend parfois triste de ne pas pouvoir croire en une grossesse surprise, de ne pas prendre ma température en sachant qu'un bon matin, elle aura fait un bond. J'écoute les femmes parler de leur grossesse, je lis les histoires de cycles qui se terminent avec deux lignes roses sur un bout de plastique et ça me donne une petite pointe d'envie. Je retrouve des émotions qui me sont déjà trop familières. Je croyais avoir fait la paix avec tout ça, mais l'impatience de recommencer pour vrai a ranimé bien des choses.

J'ai confiance. Je me laisse croire que cette fois-ci, ce sera moins long et moins difficile. Je ne me leurre pas, mais je me donne une chance. Je ne suis pas défaitiste, seulement, peut-être parfois un peu trop réaliste... Si je suis capable de laisser mon imagination courir à son gré la nuit venue, pourquoi ne pas la laisser un peu aller le jour aussi? Laissons courir la ballerine riche enceinte de triplés un peu plus librement, laissons-la nous convaincre que tout est possible, juste le temps d'y croire un peu... juste le temps de m'endormir...

1 commentaire:

  1. Sache que tu n'es pas la seule à te raconter des histoires avant de dormir. Je le fais aussi... je te dirais même que ca me fait beaucoup de bien...

    Je pense à toi :)

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