29 novembre 2005

Les congés

J'ai l'immense chance de vivre une grossesse sans problème juqu'à maintenant. J'ose espérer pouvoir continuer sur cette lancée jusqu'à la fin. Mais je me demande souvent ce que je ferais si je devais garder le lit ou simplement arrêter de travailler d'ici la naissance du bébé. Je n'ai pas droit au congé de maternité comme les femmes salariées. Je n'ai pas droit à la CSST ni au chômage, puisque je travaille à mon compte.

Travailler à mon compte a été un choix et je ne le regrette pas. Bien sûr, il y a des moments difficiles, où je me rends compte que travailler pour quelqu'un d'autre a certains avantages. Mais quand je fais de la pige à l'extérieur comme ça m'arrive beaucoup ces temps-ci, dans un petit cubicule parmis tant d'autres, avec des gens autour de moi et un patron au-dessus de mon épaule, je me rappelle à quel point je ne suis pas faite pour cette vie-là. Je suis bien chez moi, je n'aime qu'avoir moi-même comme patron.

Mais, quand viennent les jours où je suis fatiguée, ou bien malade, je me dis que ce serait bien de pouvoir caller malade et rester chez moi, au lit, à dormir. Quand viennent les jours de gros rhume comme ceux d'il y a quelques semaines, je me dis que je serais tellement mieux en pyjama, devant un bon film à boire du bouillon de poulet, plutôt que de tout faire pour garder les yeux ouverts dans mon petit cubicule beige. Mais ça fait partie de la vie d'un travailleur autonome. On peut choisir notre horaire, oui, mais aucun congé n'est payé.

J'en viens donc à me demander ce qu'il adviendrait de moi et de mes clients si je devais, d'ici la fin de la grossesse, garder le lit ou être hospitalisée. Je le ferais, pour le bien du bébé et le mien, mais le prix à payer serait énorme. Je perdrais beaucoup de contrats, probablement des clients même. Je perdrais le contrôle sur ce que j'ai mis des années à bâtir.

Quand les gens me demandent si je vais travailler jusqu'à la fin, je réponds toujours oui, je n'ai pas vraiment le choix. Il y a des jours où je me dis que j'aimerais donc ça, pouvoir arrêter un peu avant, le temps de me reposer, de faire tout ce que j'aimerais faire avant la venue du bébé. J'aimerais avoir l'esprit tranquille quelques semaines avant l'accouchement. J'aimerais pouvoir éliminer l'inquiétude de devoir gérer ma compagnie si jamais je suis forcée à rester au lit. J'aimerais pouvoir compter sur l'aide gouvernementale pour les mamans qui travaillent. Mais non, tant que je ne serai pas réellement maman, je n'aurai pas droit à un sou du gouvernement. Les travailleurs autonomes auront droit à un congé parental seulement à partir du moment où elles accouchent, et ce, à compter du 1er janvier 2006.

Je sais que beaucoup de femmes n'auront toujours rien ou n'ont rien eu dans le passé à cause de règles rigides et souvent ridicules. Je ne tente pas de faire un débat sur la question ni de faire pitié. Je veux seulement parler de ma réalité, celle d'un travailleur autonome qui travaille très dur depuis des années, qui paye ses impôts comme tout le monde à chaque année. Je tiens à en parler seulement pour qu'on arrête de me dire que je vais pouvoir me reposer pendant mon congé de maternité. Non, je ne pourrai pas, puisque quand je serai en congé, Pépin sera là. Je tiens à en parler pour que les femmes qui ont droit à cet avantage sachent à quel point elles sont chanceuses. On prend souvent ces avantages pour acquis, ils sont là et on ne se posent pas de question. Je les envie, les femmes qui choisissent de prendre un congé de maternité avant d'accoucher. Je ne les envie peut-être pas pour la même raison, les femmes qui doivent rester au repos, mais j'envie le fait qu'elles puissent le faire sans trop de tracas financiers. J'aimerais tellement avoir quelques semaines avant la venue de Pépin pour tout préparer tranquillement, pour lire les livres que je tenais à lire, pour bien profiter des derniers instants avec ma bédaine.

Au lieu de ça, je devrai continuer à travailler, essayer d'en faire le plus possible avant de partir pour ne pas que mes clients se sentent trop pris à la gorge une fois que je serai vraiment en congé. Et ce congé, il ne durera pas longtemps... 2 mois, tout au plus, puisque je devrai recommencer à travailler graduellement pour ne pas perdre ma clientèle. J'ai trouvé quelqu'un pour me remplacer, mais je vais quand même devoir m'occuper de la gestion et de l'administration. Je vais essayer de trouver un équilibre entre la vie de maman et celle de travailleure autonome. Je vais essayer de ne pas négliger le premier pour le deuxième. Je vais essayer de faire beaucoup plus que ce que je fais là, avec autant d'heures dans une journée et moins de sommeil. Et je sais que malgré tout, ça vaudra la peine.

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